18/09/2019
Les impacts négatifs de l’automobile sur notre santé, notre environnement, notre qualité et nos modes de vie sont aujourd’hui bien connus des experts, mais leur prise en compte se fait encore attendre. Le Forum Vies Mobiles a mené un travail de photo-visualisation de données avec « Les Infotographies », duo composé de Cécile Cazenave, journaliste, et de Louise Allavoine, photographe. Il met en images des grands chiffres autour de la thématique de l’automobile. À l’occasion de la semaine de la mobilité, l’équipe du Forum Vies Mobiles plaide pour une double action : traiter l’urgence climatique en réformant les véhicules et assurer la transition vers un changement de système.
Illustrations © Les Infotographies
La voiture en France, c’est près de 40 millions de permis de conduire, 80 % des kilomètres parcourus. Très populaire, malgré des impacts sur notre vie nombreux, parfois dramatiques, et souvent irréversibles.
En premier lieu, la pollution de l’air dont les premières victimes sont, ironiquement, les automobilistes eux-mêmes - ces derniers étant exposés, à l’intérieur de l’habitacle, à des taux de pollution jusqu’à cinq fois supérieurs à ceux de l’air extérieur. Ce sont chaque année plus de 45000 décès prématurés par an causés par la pollution de l’air en France : la population de Saint-Malo qui disparaît tous les ans. Les accidents de la route alourdissent ce bilan : chaque jour, 7 Français meurent dans un accident de la route impliquant une voiture.
Son coût d’achat et d’entretien pèse sur le budget des ménages : 6 000 euros par an ! Un encombrant bien coûteux, immobile, donc par définition inutile, 95 % du temps. L’automobile impose sa présence incommode, mais également sa vitesse et son rythme. Elle laisse peu de place aux autres usages comme les modes actifs (marche, vélo…) et la flânerie. Peu de place aux personnes âgées, aux enfants.
Populaire, mais également nécessaire. La dépendance à l’automobile, pour certains trajets, pour certains cadres de vie est incontestable. Et ce, non seulement dans les zones périurbaines ou rurales, mais aussi dans les petites et moyennes villes : la localisation des zones d’activités et des entrepôts induit désormais des trajets domicile-travail de périphérie à périphérie, pour lesquels l’offre de transports en commun est quasiment inexistante. Ces automobilistes n’ont pas le choix. Mais on ne veut pas le voir.
Le choix – ou justement, l’absence de choix – d’utiliser sa voiture découle de besoins bien concrets et immédiats : aller chercher ses enfants à l’école, sur la route du retour du travail, et avant de passer au supermarché faire les courses pour la semaine. Arrêtons les leçons de morale : le changement de comportements individuels, ne pourra pas, à lui seul, faire bouger les choses.
Nous nous sommes retrouvés prisonniers d’un système, érigé autour du pétrole, de la vitesse, de l’automobile, que nous n’avons ni voulu ni choisi. Un système qui nous pousse à nous déplacer de plus en loin, de plus en plus vite, de plus en plus souvent. Qui participe à l’uniformisation de nos paysages, à l’étalement urbain et à la spécialisation des territoires. Somme toute, un système qui conditionne, qui contraint nos modes de vie et la façon dont nous nous déplaçons au quotidien.
Un système, surtout, dont l’impact climatique ne peut plus être ignoré. Il devient impératif d’opérer un réel changement systémique, basé sur la réduction du nombre de véhicules en circulation et sur l’évitement des déplacements. Et si ce processus de longue haleine doit être amorcé dès maintenant, l’urgence nous pousse malgré tout à mettre en place des mesures à forts impacts, basées sur les outils dont nous disposons aujourd’hui. Même si - et c’est le cas du véhicule électrique - ils ne constituent pas des solutions miracles.
Les pouvoirs publics, et ce n’est pas peu dire, ont leur rôle à jouer. La loi d’orientation des mobilités votée en ce moment à l’Assemblée prévoit l’interdiction des véhicules à moteur pour 2040. Mais pourquoi vouloir à tout prix jeter des véhicules tout à fait fonctionnels, plutôt que de permettre le remplacement de leurs moteurs uniquement ? Évitons un gaspillage immense de matières premières et d’énergie.
Agir via les entreprises ? Aujourd’hui, près de 40 % des véhicules neufs produits en France sont destinés aux flottes d’entreprises. Il s’agirait en premier chef d’imposer l’électrification et la diversification de leurs offres : scooters et vélos électriques.
Il est désormais évident que la solution ne viendra pas des constructeurs automobiles, quelle que soit la rhétorique écologique inoculée dans les discours. Dans un rapport récemment publié, l’ONG Greenpeace dénonce la pollution de l’air engendrée par les véhicules SUV et 4x4, plus lourds et plus volumineux que la moyenne. Interdisons leur production, au profit de véhicules plus petits, plus légers, moins polluants.
« Arrêtez d’utiliser votre voiture », « Pensez à la planète », « Changez vos comportements ». Mais surtout, surtout, achetez le dernier SUV, nous dicte la publicité. « Roulez librement dans une ville miraculeusement vide de tout embouteillage, dans des paysages naturels incroyablement préservés ».
Finissons-en avec les injonctions contradictoires. Et agissons sans attendre.
Pour le Forum Vies Mobiles, la mobilité est entendue comme la façon dont les individus franchissent les distances pour déployer dans le temps et dans l’espace les activités qui composent leurs modes de vie. Ces pratiques de déplacements sont enchâssées dans des systèmes socio-techniques produits par des industries, des techniques de transport et de communication et des discours normatifs. Cela implique des impacts sociaux, environnementaux et spatiaux considérables, ainsi que des expériences de déplacements très diverses.
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