Jeunes chercheurs 12 Mai 2021
En entrant par les enjeux de la vitesse ou de la lenteur, cette recherche interroge la manière dont la conception ou l’adaptation des infrastructures de mobilité traduisent un changement dans le rapport à l’espace-temps. L’originalité du travail est de donner toute son importance à la matérialité de ces transformations et de la situer dans un contexte particulier, celui de la ville et de l’agglomération bruxelloises. A l’interface entre urbanisme, architecture, études de mobilité, sciences sociales et philosophie esthétique, ce travail analyse les infrastructures de mobilité qui articulent fonctionnalité et esthétisation comme des environnements sensibles en constante évolution — aussi bien socialement, phénoménologiquement que matériellement. Ce travail a été récompensé par le prix Mobilithèse 2021.
La ville est construite pour être traversée à certaines vitesses. Le rythme des façades, la hauteur des bâtiments, la largeur des voies de circulation… sont construits en référence à des pratiques de vitesse et de lenteur pour induire une expérience particulière de la ville. Ma recherche s’intéresse à l’évolution des aménagements qui sont conçus pour les différentes formes de mobilité considérées comme rapides et comme lentes, et des manières d’être mobile et de sentir son environnement que ces aménagements encouragent. Ces éléments sont analysés comme ceux à travers lesquels « s’incarnent » dans la ville les imaginaires (Castoriadis 1975) de vitesse et de lenteur – ces visions du monde, qui représentent le réel et, donnant du sens à l’environnement et aux actions, sont indispensables pour le penser et pour l’agir.
Ces incarnations se partagent l’espace urbain et s’articulent entre elles à différentes échelles. En effet, malgré la possibilité de se déplacer de plus en plus vite (et de communiquer à distance), la vitesse n’a pas remplacé la lenteur. Au contraire, les usagers de la ville disposent d’un éventail de vitesses pour la parcourir, dont certaines sont davantage valorisées dans certains espaces urbains et peuvent entrer en friction avec d’autres. Vitesse et lenteur se définissent, dans cet éventail, par contraste, suivant des normes de référence en constante évolution qui dépassent la question du rythme et de l’allure. Avec le ralentissement automobile et l’accélération des mobilités actives, la vitesse d’un vélo s’apparente aujourd’hui davantage à celle de la voiture urbaine qu’à celle du piéton. Les mobilités lentes – dans leurs variations accélérées, sportives, ludiques et saines – se renouvellent pour répondre aux besoins de connectivité dans la ville et constituer des alternatives à la voiture. Avec le temps émergent des pratiques et des infrastructures de mobilités hybrides : entre vitesse ralentie et lenteur accélérée. Néanmoins, je distingue au départ dans ma recherche les modes motorisés qui relèvent de l’accélération technique, de la vitesse, et les modes « lents », « doux », « actifs » attachés à la lenteur par leur lien historique à la promenade, aux mobilités d’agrément et de loisir et aux logiques de lieu (Pelgrims 2019).
Vitesse et lenteur sont encore aujourd’hui au cœur de nombreux débats sur l’aménagement des espaces publics. Le déplacement des frictions et articulations entre vitesse et lenteur témoigne de la tension entre imaginaires qui guide sur le temps long l’évolution des infrastructures de mobilité. Analyser ensemble les imaginaires de vitesse et de lenteur permet ainsi de mieux comprendre la transformation des infrastructures de mobilité depuis le milieu du XXe siècle. Je l’ai fait dans ma thèse à partir du cas bruxellois dont le contexte socioculturel spécifique, l’héritage moderniste et postmoderniste très important, et, enfin, la complexité de l’appareil de planification urbaine partagé entre différents niveaux de pouvoir 1 en font un cas intéressant – même si cette dialectique vitesse/lenteur reste pertinente pour d’autres contextes.
Les imaginaires dominants de vitesse et de lenteur impactent l’échelle à laquelle la ville est conçue. Penser la ville à différentes vitesses, c’est en effet la concevoir à différentes échelles. Pour diviser la longue période étudiée, j’ai utilisé la notion de « desserrement », utilisée au moment de la Rénovation urbaine (1949-1989) dans des opérations qui visaient à détendre et à relâcher le tissu urbain à l’échelle de l’agglomération pour y faire entrer les trois matériaux fondamentaux de l’urbanisme moderne : soleil, espace, verdure ; à cette notion, j’ai fait répondre celle de « resserrement », qui , au contraire, fait référence à la concentration des fonctions attractives dans une continuité de bâti sur un territoire restreint. Ces termes se rapprochent ainsi des processus d’automobilisation (extension de l’habitat humain, dispersion des lieux dans l’espace et fragmentation des flux temporels 2 permis par la vitesse automobile) et d’urbanisation (intensification de l’habitat humain, concentration de lieux, unité des flux temporels), décrits par Sheller et Urry, qui ensemble caractérisent la modernité et la culture des villes (2000). La tension entre imaginaires de vitesse et de lenteur orchestre ainsi des dynamiques de desserrement et de resserrement du tissu urbain agissant simultanément à différentes échelles tout au long de la période étudiée, et qui renvoient à différentes conceptions de l’espace et du temps. On peut cependant distinguer trois grandes dynamiques incrémentales : le desserrement dans la ville moderniste (à partir de 1950), le resserrement dans la ville postmoderne (à partir de 1968) et le desserrement dans la ville du futur (à partir de 2000).
À travers ces dynamiques, les imaginaires de vitesse et de lenteur font l’objet d’un double processus. D’une part, les plaisirs et déplaisirs à expérimenter la ville renouvellent ou renforcent au quotidien ces imaginaires. D’autre part, les imaginaires s’incarnent dans la matérialité de la ville, la déstructurent et la restructurent continuellement à travers une pluralité d’incarnations dans le terrain, le sensible et l’image. L’imaginaire de la lenteur, par exemple, s’incarne à la fois dans le construit des villes à travers des infrastructures dédiés aux modes lents, des dispositifs ralentisseurs et des limitations de vitesse, mais aussi dans des manières sensibles de se mouvoir lentement et de sentir son environnement (manières d’être sensori-motrices), elles-mêmes liées à des affects positifs, des représentations, des récits, des valeurs et des normes sociales valorisant ces formes de déplacement. Par rapport à d’autres concepts se concentrant sur les discours comme celui de référentiel 3, l’intérêt du concept englobant d’imaginaire est justement de permettre de tirer parti, au-delà des images, de différents corpus documentant l’évolution des infrastructures de mobilité : aussi bien les plans locaux d’aménagement, les débats politiques, la matérialité et le détail des aménagements, que les pratiques et les discours et représentations.
Figure 1 Porte de Namur et avenue de la Toison d’Or, 1972. © AGR, Photothèque du Min. des Travaux publics, n°4/48067.
Figure 2 Eclairages de type autoroutier sur les boulevards de Petite Ceinture, 1958. © AVB, DD 529. Toute reproduction, intégrale ou partielle, par quelque procédé que ce soit, faite sans le consentement des propriétaires de l’œuvre et des Archives de La Ville de Bruxelles, est illicite.
Figure 3 Maquette du plan particulier d’aménagement de l’avenue Louise, ca 1971. © Collection Georges Binder/ Building & Data SA.
La Rénovation urbaine est la période où se sont le mieux incarnés l’imaginaire de la vitesse et l’esthétique de l’accélération. Cette photographie de 1972 (Figure 1) illustre bien les deux logiques qui sous-tendent, dès 1949 et jusqu’à la création de la Région bruxelloise en 1989, la construction d’un roadscape : ce paysage déroulé et tangent de la route et de ses abords. Celui-ci accentue la séparation entre les espaces pour la vitesse et pour la lenteur, permettant ainsi une accélération de la vitesse en voiture. À travers les architectures de grande hauteur, ici un immeuble-tour de bureaux, il s’agit d’opérer un « desserrement » du centre-ville selon le modèle des barres de logements développés à la même époque dans les parcs de la périphérie directe (Leloutre et Pelgrims 2017). Monter en hauteur et démultiplier les niveaux de sol (tunnel, viaduc, métro, galeries) permet de répondre à la pression spatiale croissante de l’automobilité tout en sauvegardant, en bordure du roadscape, des espaces ponctuels de mobilité lente renforçant les noyaux commerciaux et touristiques existants. Le socle de la tour représentée accueille une des six galeries commerçantes du haut de la ville, tandis que le parvis dégagé au pied de celle-ci devait s’inscrire, avec la contre-allée plus tard transformée en secteur piétonnier, dans une continuité d’espaces verts ou végétalisés tout au long de l’autoroute urbaine que constitue la Petite Ceinture au premier plan (Figure 2). Cette architecture moderniste est ainsi pensée comme un ensemble, un volume en 3D, finement articulé à la voirie, qui intègre les infrastructures de transport public, de mobilité lente et d’immobilité. Mis en séquence le long des autoroutes urbaines entre les espaces végétalisés (les parcs du Roi et de l’Abbaye de La Cambre connectés par des pelouses arborées), les immeubles modernistes de l’avenue Louise, par exemple, devaient participer à la constitution d’un nouveau paysage moderne (Figure 3) en phase avec la nouvelle société du XXe siècle et observé à toute vitesse à travers le pare-brise de la voiture qui incarnait alors la liberté et la modernité.
C’est dans le cadre du développement des galeries commerçantes du haut de la ville, dont la Galerie de la Toison d’Or (Figure 4), qu’émergent deux logiques paradoxales d’accélération et de ralentissement de la lenteur, en invitant les piétons à circuler dans les galeries tout en y séjournant. Contrairement aux trottoirs étroits et encombrés, ces galeries sécurisent les parcours lents et offrent aux piétons une continuité spatiale et qualitative de leurs infrastructures qui, en premier lieu, « accélère » la lenteur à l’intérieur de cet espace ponctuel, en ce sens qu’elle encourage le chaland à l’explorer, à s’y déplacer, la marche étant une ressource pour le commerce (Pelgrims 2019). Mais il s’agit aussi, en second lieu et paradoxalement, de ralentir et de garder captives les mobilités piétonnes à l’intérieur de leur espace restreint. Il ne s’agit plus de parcourir la ville à pied ; au contraire, les espaces réservés aux piétons sont ponctuels. Pour garder les piétons sur place, les galeries multiplient leurs fonctions : commerces – ici accessibles par deux étages de galeries –, restaurants, salle d’exposition… Tout dans la mise en ambiance moderne et luxueuse (éclairage, distance entre les vitrines, végétalisation, revêtements) invite à ne plus en sortir (Figure 5). Enfin, la coupe de la Galerie Toison d’Or révèle la fine connexion des infrastructures de mobilités rapides (accès métro, parking, tunnel autoroutier) avec ce complexe architectural qui s’érige ainsi en destination. Au-delà de cette injonction paradoxale de circuler et séjourner, l’urbanisme commercial des galeries émancipe l’homme moderne des conditions climatiques (on monte du parking par ascenseur et escalator et on fait son shopping au sec).
Figure 4 Coupe perspective de la Galerie Toison d’Or illustrant la démultiplication des niveaux de sol et la fine connexion des infrastructures de mobilités rapides avec le complexe architectural (accès métro, parking, tunnel autoroutier). Source : André Hustin, « La nouvelle Galerie de la Toison d’Or honorera le souvenir de Philippe le Bon. Coupée de ronds-points prestigieux et doublée dans sa hauteur », 13 mars 1965, p.1. © KBR.
Figure 5 « La Galerie de la Toison d’Or accessible aux piétons », La Lanterne, 8 octobre 1965. © KBR.
C’est dans les espaces piétonniers et semi-piétonniers – étonnamment appelés à l’époque « galeries à ciel ouvert » –, aux abords des galeries (Figure 6) et dans le centre-ville médiéval de Bruxelles (Figure 7), qu’apparaît dès les années 1970 une nouvelle logique. Avec l’interdiction de stationnement, puis de circulation, pour l’agrément du piéton et la défense de l’attractivité économique des centres-villes, c’est la vitesse automobile qui est progressivement rendue invisible dans ces espaces particuliers. Dans l’analyse des débats autour de l’aménagement du centre-ville se dévoile une lente évolution de la définition de l’attractivité urbaine, qui se détache peu à peu d’une animation urbaine fortement marquée par la circulation automobile – jusqu’alors synonyme de progrès et de modernité –, pour tendre vers un modèle esthétique passéiste, celui de la ville européenne idéalisée du XIXe siècle décrite par Yves Chalas comme la « ville d'hier » : « la ville de l'harmonie, la ville de l'unité, la ville minérale, la ville dense, la ville centre, la ville de la forme aux contours nets et au centre de gravité stable » (Chalas 1997, 242). C’est la chute des grands récits, la fin d’un âge des idéologies qui promettaient un avenir meilleur et exaltant (Ricœur 1991). On se tourne alors vers le passé.
Figure 6 Avenue de la Toison d’Or, 1973. Fonds Travaux Publics © AGR, Photothèque du Min. des Travaux publics, n°4/54600.
Figure 7 René Haquin, « Rues sans voitures à Bruxelles. Ce que pensent les habitants de l’îlot sacré où, depuis quelques temps, se poursuit cette expérience », Le Soir, 31 juillet 1969, p.10. © KBR.
À travers les politiques de l’Agglomération de Bruxelles et, ensuite, de la Région, la question de la mixité et du partage modal de la voirie se pose progressivement et de manière différente. La lenteur n’est plus seulement envisagée à l’échelle des espaces ponctuels de destinations (galeries commerçantes, secteurs piétonniers patrimoniaux, parcs), mais à l’échelle du centre-ville pour y aménager une ville marchable. La critique de la rénovation urbaine pendant les luttes urbaines 4 a en effet mené au mouvement de Reconstruction de la Ville Européenne dominé par l’impératif de patrimonialisation du bâti. L’articulation dans le centre-ville de l’imaginaire de la lenteur avec les enjeux patrimoniaux soulevés par ce mouvement idéologique tend à favoriser la restauration des revêtements pavés et des perspectives monumentales de la ville du XIXe siècle. La logique de continuité qualitative des aménagements piétons rime alors souvent avec des opérations d’embellissement visant la reconstruction des aménagements, mais aussi la reconstitution du vivre-ensemble idéalisé de la ville européenne du XIXe siècle. Le resserrement densifie le tissu urbain pour garantir une continuité de l’animation urbaine : l’échelle des aménagements s’adapte au rythme du piéton. Parce que la séparation entre vitesses n’est plus pensée à l’échelle de l’agglomération (en termes de poches de lenteur desservies par la vitesse), mais à l’échelle de la rue – notamment dans le détail de la bordure du trottoir (Figure 8) –, il devient également nécessaire de ralentir la vitesse de la voiture. S’ajoutent donc des logiques de ralentissement des vitesses automobiles qui articulent différents dispositifs d’invisibilisation de la vitesse (interdiction du stationnement en voirie, mise en tunnel), mais aussi d’externalisation (élargissement des secteurs piétonniers, mise en place de boucle de circulation éliminant le trafic de transit) et de « domestication » de la vitesse (limitations de vitesse, dispositifs ralentisseurs, floutage de la ségrégation modale…) (Pelgrims 2018). Alors que l’imaginaire de la lenteur profite de la montée en importance des imaginaires écologistes, ces logiques se déclinent et se précisent progressivement à travers la gestion environnementale de la nouvelle Région bruxelloise créée en 1989 – en particulier à travers la lutte contre le bruit routier.
Figure 8 Cette coupe de la rue Marché-aux-Herbes illustre comment s’opère la séparation entre vitesse et lenteur, ici seulement marquée par un léger dénivelé entre la voirie et le trottoir. Source : Coupe AA. Permis d’urbanisme Rue Marché-aux-Herbes, 1993. © AVB, TP 105 573. Toute reproduction, intégrale ou partielle, par quelque procédé que ce soit, faite sans le consentement des propriétaires de l’œuvre et des Archives de La Ville de Bruxelles, est illicite. (haut) Cet aménagement s’imposera ensuite comme modèle pour la rénovation de toutes les rues du centre historique. Cellule Patrimoine historique, « Etude historique relative au revêtement de voirie du quartier de la rue des Bouchers, Petite rue des Bouchers, rue des Dominicains, rue d’Une Personne, des Impasses Schuddeveld et de la Fidélité et de la Grand-Place », Bruxelles, Ville de Bruxelles, octobre 2013, p. 10.© Ville de Bruxelles – OPP – CPH (bas)
Les imaginaires de vitesse et de lenteur investissent ainsi différentes parties de la ville dans le temps. Partant des premiers espaces ponctuels de destination aux abords du roadscape ou dans les îlots patrimoniaux du centre-ville, l’imaginaire de la lenteur étend son emprise pour englober une part croissante du centre-ville, allant jusqu’à couvrir, par exemple avec la zone 30 régionale, une part importante du territoire régional et puis métropolitain. Il tend ainsi à remplacer l’imaginaire de la vitesse automobile et impose des dispositifs matériels et réglementaires de décélération, mais aussi des pratiques adaptées. À titre d’exemple sur ce dernier point, les fluctuations du partage de la voirie entre vitesse et lenteur redéfinissent les enjeux de la sécurité routière et déplacent progressivement la responsabilité des accidents des piétons et cyclistes « inconscients » vers les « chauffards » et « cow-boys » de la route.
Avec le tournant des années 2000, l’imaginaire de la lenteur se détache du modèle de la ville européenne du XIXe siècle pour augmenter l’attractivité culturelle et commerciale de la ville. Celle-ci se joue dans sa capacité à concilier une bonne accessibilité de la capitale avec les exigences de lenteur des pratiques urbaines privilégiées, liées notamment à la montée de l’imaginaire écologiste du ralentissement des rythmes de vie, mais aussi à l’industrie du tourisme et à la consommation de la ville.
Alors que se diversifient les pratiques de mobilités lentes, sportives et ludiques (vélo, trottinette, skate, monoroues, etc.) qui sont amenées à prendre un rôle important dans les déplacements fonctionnels, le réseau des infrastructures de mobilités actives se divise également de plus en plus selon différents degrés d’efficacité (permet d’aller rapidement d’un point à un autre), de lisibilité (correspond à de grands axes urbains) et d’agrément (permet une expérience enrichissante de l’environnement). Les infrastructures pour la marche, par exemple, sont classées en itinéraires principaux, en liaisons interquartiers et en voies lentes exclusives qui s’ajoutent au réseau « de base » des trottoirs couvrant toute la région. Auparavant, la hiérarchie traditionnelle de la voirie définissait une route, une rue en fonction de son importance pour le trafic automobile, réfléchissant ainsi en creux l’espace laissé aux autres modes. Progressivement se dessine ainsi une « spécialisation multimodale de la voirie » qui décline la hiérarchie des voiries pour chacun des modes.
D’une part, cette spécialisation accentue les logiques de ralentissement de la vitesse automobile et d’accélération des mobilités lentes de la dynamique précédente. À mesure que les pratiques de vitesses automobiles sont ralenties ou éloignées de la ville, leurs infrastructures peuvent être réappropriées pour des mobilités dites « plus urbaines ». D’autre part, en développant un réseau hiérarchisé de voies lentes, elle reprend aussi la logique de séparation entre les espaces dévolus à la vitesse et à la lenteur de la ville moderniste pour promouvoir des espaces paysagers permettant, en évitant que les différents flux ne se croisent, l’accélération des pratiques diversifiées de la lenteur. Le développement d’un réseau d’« autoroutes » à vélo en est un exemple, mais aussi la valorisation d’une ancienne ligne de chemin de fer, devenue un couloir écologique permettant la migration des plantes et animaux, en itinéraire cyclopédestre séparé du trafic par différents ponts (Figure 9). Cette logique tend à produire non plus un roadscape, mais un réseau « Confort » de pistes cyclopiétonnes mettant en valeur la topographie et le paysage naturel et urbain. Elle permet ainsi aux pratiques de lenteur de concilier davantage vitesse du déplacement et expérience enrichissante de l’environnement, tout en tissant de nouvelles relations de continuité entre le centre-ville, la région et la périphérie urbaine proche. En s’étendant au sein d’une métropole lente qui retisse des liens avec sa périphérie proche, les infrastructures cyclables redéfinissent ainsi l’échelle de la ville dans un processus de desserrement urbain (Figure 10).
Figure 9 Exemple d’infrastructure cyclopédestre urbaine séparée, aménagée sur le tracé d’une ancienne voie ferrée se situant en hauteur par rapport à la rue. La Promenade du Chemin de Fer, 2010. © Dessin et Construction.
Figure 10 Projet urbain pour le Parkway de Bruxelles - E40, 2015. © TVK et Karbon’ en association avec OLM, EGIS, IDEA Consult et ELIOTH.
Chaque dynamique a ainsi fait l’objet dans ma recherche d’une approche multiscalaire : de l’échelle métropolitaine ou nationale de la planification de la mobilité jusqu’à celle du détail constructif des infrastructures de mobilité donnant prise à différentes manières d’être. Et ceci, afin de déterminer les ensembles de logiques à travers lesquelles les imaginaires de vitesse et de lenteur investissent la ville. Celles-ci peuvent être conceptualisées à travers la notion de grammaire d’aménagement et de vivre-ensemble. Cet ensemble de règles transpose spatialement une conception abstraite de l’imaginaire dans des aménagements favorisant certaines manières d’être sensori-motrices. En se matérialisant, l’imaginaire se stabilise et fige les alternatives envisageables ; ses aménagements et ses pratiques se normalisent petit à petit. Ainsi, chaque grammaire permet, au départ, la mise en place d’une forme alternative d’aménagement et de vivre-ensemble, mais en prenant de l’importance, comme la précédente grammaire dominante avant elle, elle formate les objets et les manières d’être, cherchant à minimiser ou invisibiliser les objets non indiqués et les comportements jugés fautifs au regard de cette grammaire (Pelgrims 2018, 155) – les voitures garées, les feux de circulation et les éclairages de type autoroutiers, les conduites automobiles rapides, etc.
Le concept de grammaires d’aménagement et de vivre-ensemble permet ainsi d’appréhender la stabilisation des infrastructures de mobilité et des autres incarnations d’imaginaires. Néanmoins, tout comme la grammaire française, ces grammaires de vitesse et de lenteur ne sont pas figées. Le processus continu d’actualisation des imaginaires à travers l’expérience de la ville implique en effet une lente évolution de ces grammaires qui se précisent, se renforcent, se transforment et s’agencent entre elles pour occuper différentes parties de la ville, comme l’exemplifie la transformation de la grammaire de la lenteur, qui s’est déployée pour occuper une part de plus en plus importante du territoire du centre-ville, de la région puis de l’aire métropolitaine.
À un certain moment dans ma recherche s’est posée la question de la façon d’aborder l’autonomie, l’agentivité acquise par certaines infrastructures de mobilité dans la ville pour se maintenir, notamment l’infrastructure d’automobilité. C’est comme cela qu’est venue l’idée de parler des infrastructures de mobilité comme fétiche. Je me suis basée sur les quatre thèmes récurrents autour de ce concept que soulignent les travaux de William Pietz (1987, 23) sur l’histoire du terme – de la théorie générale des religions primitives aux discours théoriques du XXe siècle en anthropologie, économie politique, psychiatrie ou philosophie esthétique (Sartre 1986; Lévi-Strauss 1963; Deleuze 1972; Latour 1996). Le fétiche, objet magique doté d’un pouvoir performatif supranaturel, est chargé de valeurs que lui donne la société. Dans le cadre théorique que je propose, les différentes grammaires des imaginaires de vitesse et de lenteur, en agençant les différentes incarnations dans la ville, structurent celles-ci en un « système » plus ou moins stabilisé selon la prégnance de l’imaginaire, dont les différents éléments dans le terrain, le sensible et l’image se renforcent mutuellement par leurs entremêlements. Le fétiche est ainsi un système fortement stabilisé, un assemblage d’éléments hétérogènes qui tire son pouvoir de ces entremêlements.
Par exemple, l’infrastructure d’automobilité dépend pour sa signification et sa valeur du système social et matériel de l’automobilité décrit par Sheller et Urry (2000), dont elle fait partie. En particulier, la culture dominante de l’automobilité induit des discours normatifs sur ce qui constitue une bonne vie, véhicule des images et des symboles qui valorisent cette forme de mobilité individuelle en l’assimilant à l’exercice d’une liberté personnelle, et rend « naturelles » la mobilité automobile et son infrastructure dans notre quotidien.
L’infrastructure d’automobilité s’inscrit dans un assemblage d’infrastructures, de bâtiments, de signes (panneaux, enseignes, lignes blanches…), mais aussi de croyances, de peurs et d’affects, d’images, de valeurs (liberté, émancipation, démocratie, individualisation…) et de pratiques (mobilité fonctionnelle et d’agrément, expression de soi, distinction sociale…). Cet assemblage détient le pouvoir de s’étendre grâce à un effet boule de neige décrit comme le « cercle magique » (Dupuy 1999) du développement automobile. L’expansion du réseau routier encourage les automobilistes à conduire davantage, entraînant plus d’individus à acheter une voiture pour profiter des avantages croissants des automobilistes, augmentant ainsi la circulation automobile et la nécessité du développement du réseau routier. Cet assemblage étend également son emprise parce qu’il renouvelle à la fois la manière d’expérimenter la ville et la sensibilité esthétique. L’assemblage de bâtiments, de route et de nature au sein du roadscape compose le décor de ce qui est considéré comme une société meilleure et une vie heureuse, mais constitue aussi une « unité esthétique » moderniste, qui amplifie les plaisirs de la conduite automobile – aussi répercutés à travers le cinéma, la photo, la littérature, la publicité, etc. (Figure 11) – et stabilise l’imaginaire de la vitesse automobile et ses incarnations.
Figure 11 Exemple de campagne publicitaire Esso « Meilleurs routes = Meilleure vie » in Routes, 1951, n°7, p. 314. © ExxonMobil
Ces plaisirs de la conduite émanent des sensations corporelles, notamment visuelles, mais également d’un sentiment d’ubiquité et d’agilité dans la gestion des rythmes quotidiens (Figure 12). Et ce, alors même que l’infrastructure d’automobilité constitue un réseau dirigé par la technocratie et les experts (Code de la route, etc.) contraignant les individus dans leurs déplacements, leurs rapports interpersonnels et leurs modes de vie. En effet, l’infrastructure d’automobilité, en desserrant la ville, augmente les distances à parcourir et contraint les individus à « orchestrer leurs mobilités et les socialités de manières complexes et hétérogènes » dans un temps qui, lui, n’augmente pas (Urry 2005, 71).
Figure 12 Avenue Louise, 1967. © AGR, Photothèque du Min. des Travaux publics, n°4/28550. (haut) Jerzy Skolimowski, Le Départ, 1967. (bas)
À travers cet exemple de l’infrastructure d’automobilité, on voit que le terrain (ici la route) tire son autonomie et son pouvoir de ce système d’interrelations avec les autres incarnations de l’imaginaire de la vitesse automobile dans le sensible et l’image. En particulier, le plaisir dans le déplacement apparaît dans cette perspective comme un élément essentiel à la stabilisation de l’infrastructure. Or il ne se définit pas de la même manière suivant les expériences promues de la ville, mais aussi les modèles urbains (modernistes, patrimoniaux…) qui guident l’embellissement des bâtiments et des rues par les pouvoirs publics. Ceux-ci varient fortement, même si l’attractivité de la ville est un argument récurrent dans les trois dynamiques. L’esthétisation de l’expérience de la vitesse et de la lenteur se joue dans l’adaptation de la forme urbaine et de l’environnement aux différentes pratiques pour accentuer les sensations corporelles particulières aux modes de mobilité. Le roadscape propose par exemple une nouvelle monumentalité tangente et cinétique dont on ne jouit pleinement qu’à toute vitesse sur les autoroutes urbaines. Cette expérience promue contribue également à l’animation des espaces (ville animée, accélérée versus apaisée et ralentie) dont l’appréciation évolue sur le temps long, révélant plus généralement les continuités et discontinuités des ambiances 5 urbaines valorisées. Aujourd’hui, le ralentissement de la vitesse automobile permet l’aménagement d’ambiances urbaines calmes et attractives, permettant le développement de relations sociales et d’expériences désirables du cadre urbain, notamment à travers les mobilités lentes accélérées par des accessoires et véhicules ludiques.
Je déploie donc le concept de fétiche (Pelgrims 2020) pour mieux saisir ces interrelations et interdépendances par lesquelles se renforcent mutuellement les différentes incarnations des imaginaires. J’évite ainsi les difficultés rencontrées par les études dans le domaine des mobilités ou de l’urbanisme qui négligent les dimensions représentatives (images mentales visibles à travers le film, la photographie) et esthétiques (désirs, investissements affectifs, sensibles et passionnels) des infrastructures. Ce concept de fétiche permet de mettre en lumière les dépendances fonctionnelles, sensibles et socio-symboliques à l’infrastructure d’automobilité qui expliquent sa stabilisation, sa permanence et son emprise spatiale dominante (Pelgrims 2020). Il permet de différencier les pratiques – émergentes, dominantes ou résiduelles – répondant à différents attachements à l’infrastructure (pour elle-même ou pour ce qu’elle permet), structurant différentes communautés (sportifs, collectionneurs, élites intellectuelles, écologistes), autour de différentes valeurs (mobilité, liberté, écologie, distinction sociale, santé, sport) elles-mêmes résonnant à travers différentes facettes de cette infrastructure (le réseau qu’elle forme, ses structures exceptionnelles et ouvrages d’art esthétisés et désirables, en tant que marqueurs urbains témoignant du progrès technologique de la société, etc.) (Pelgrims 2020). Le concept de fétiche ouvre aussi des pistes de réflexion pour stabiliser les nouvelles mobilités. Je mobilise aussi ce concept pour analyser les investissements dans les infrastructures cyclables qui émergent fortement aujourd’hui et créent l’espoir d’une société alternative plus durable.
Mon hypothèse est qu’à travers l’accélération de la lenteur se tissent progressivement de nouvelles relations affectives et éthiques à la mobilité et à la ville à travers un renouvellement de l’assimilation entre mobilité individuelle (active) et liberté personnelle (Pelgrims 2019). Les quatre thèmes du fétiche permettent d’analyser les entrelâcements entre les infrastructures du vélo et les autres incarnations de l’imaginaire de la lenteur accélérée avec lesquelles elles forment un système.
(1) La dépendance au système. Les infrastructures cyclables sous-tendent et dépendent à la fois d’un système social et matériel émergent : la vélomobilité, qui s’appuie sur ce que Frédéric Héran (2018) définit comme le « système vélo » (vélos abordables, réseau d’infrastructures et de services, règlements, communication et formation, etc.). Celui-ci est légitimé, d’une part, par l’approche technique des ingénieurs et économistes des transports qui rationalisent les flux piétons, cyclistes, automobiles et des transports publics pour organiser un partage de l’espace public répondant aux crises urbaines et environnementales. Les militants vélo, d’autre part, participent à diffuser plus largement les bienfaits du réseau cyclable pour des modes de vie plus durables et éthiques, s’efforçant d’essaimer de nouvelles cultures du vélo.
(2) Le cercle magique du développement des infrastructures. Le fétiche qui se profile dans la ville du futur est aussi un assemblage d’infrastructures cyclables, de bâtiments, signes, croyances, peurs et affects, d’images, de valeurs de liberté personnelle et de pratiques de mobilité active individuelle qui tire son identité et son pouvoir de sa capacité durable à se renouveler et à s’étendre. Il transforme son environnement pour renforcer et stabiliser la pratique du vélo à travers ce qui pourrait être assimilé à un « cercle magique » du développement des infrastructures de mobilité douce. Dans la littérature, on discute en effet des cercles vertueux permettant l’essor du système vélo (Héran 2018). Celui-ci permet de plus en plus aux nouvelles infrastructures de mobilité de structurer l’expérience de la ville à vélo. Elles promeuvent ainsi une sensibilité au Beau spécifique à la vitesse à laquelle la ville est parcourue, renouvelant les plaisirs à pédaler dans la ville compacte, mais verdoyante (Figure 13).
Figure 13 Projections de l’avenue Louise et du boulevard du Jardin Botanique en 2040. Bruxelles Mobilité, « Mobil 2040. Regards sur la mobilité du futur », Brochure de présentation, Bruxelles, 2014, p. 1.
(3) Sa matérialité transcendante. Cet assemblage d’éléments hétérogènes qu’est le fétiche s’amplifie et se cristallise à travers la sensation de liberté dans les déplacements en vélo. Plus que l’automobile à l’heure de la congestion, le vélo procure un sentiment d’ubiquité et d’agilité dans la gestion des rythmes quotidiens (pouvoir être partout rapidement et donc flexible, esquiver la congestion automobile). Il offre aussi une palette de sensations corporelles liées à la dimension physique et incarnée de la pratique de la vitesse (le plaisir de l’effort physique et de la maîtrise de l’engin, la perception par les cinq sens du vent, du soleil, de l’atmosphère, de la qualité du revêtement et du paysage) (Figure 14) qui résonnent poétiquement (Sansot 1971) avec les représentations culturelles du vélo émancipateur. Les infrastructures cyclables deviennent ainsi le lieu « magique » d’une expérience assimilée à l’exercice d’une liberté personnelle, mais aussi, et surtout, d’un rapport particulier – une reconnexion – à l’espace, au temps et à soi. Cette nouvelle fétichisation des infrastructures cyclables – hybride de vitesse et de lenteur – réunit donc les valeurs traditionnellement associées à la vitesse (efficacité, connectivité, liberté, progrès) avec celles davantage liées à la lenteur (écologie, ralentissement des rythmes de vie, engagement avec le milieu).
(4) L’organe de contrôle extérieur. À l’opposé, le réseau cyclable peut également s’envisager comme un réseau contraignant tous les individus dans leurs déplacements (priorisation des modes, sens de circulation, minutage des feux) ; un réseau qui contraint surtout les cyclistes quotidiens à relocaliser leur mode de vie. En effet, à l’inverse des infrastructures d’automobilité qui favorisent la dispersion de l’habitat et des activités sur le territoire, il encourage à relocaliser son habitat, ses centres d’intérêt ( travail, école, loisir, activités diverses, etc.) et son réseau social dans le rayon d’action, plus réduit, du vélo.
Figure 14 Photographie utilisée dans la cadre de la campagne de sensibilisation « Bike for Brussels », 2018. © Bruxelles-Mobilité.
Une des ambitions de la recherche était de discuter les notions de vitesse et de lenteur en étudiant ce double processus de desserrement et resserrement des aménagements urbains, agissant simultanément à différentes échelles tout au long de la période étudiée et dans lequel s’inscrit la tension entre imaginaires de vitesse et de lenteur. Ces imaginaires se transposent en différentes grammaires d’aménagement et de vivre-ensemble (grammaire de vitesse automobile, de lenteur moderniste, grammaire de lenteur et, finalement, de lenteur accélérée) pour régler l’articulation entre vitesse et lenteur. La tension entre imaginaires de vitesse et de lenteur fait ainsi évoluer l’échelle de la ville, mais aussi les limites entre les espaces dévolus à la vitesse ou à la lenteur. La continuité de cette tension se marque également dans l’évolution de l’esthétique valorisée à travers l’ambiance urbaine. Les investissements esthétiques et affectifs, pratiques et culturels dans une ville dont on fait l’expérience en mouvement, tels qu’ils évoluent à travers les trois dynamiques étudiées, ont été discutés autour du concept de fétiche. Pertinents pour d’autres contextes, les deux concepts de grammaires et de fétiche ouvrent différentes perspectives de recherche sur l’articulation entre fonctionnalité et esthétisation des infrastructures de mobilité qui apparaissent plus que jamais pertinentes à investiguer pour informer une transition des mobilités contemporaines vers plus de durabilité – une transition qui s’appuie sur les imaginaires et notamment les résonnances sensibles, affectives et éthiques entre les pratiques et les infrastructures de mobilité.
Castoriadis, Cornelius. 1975. L’institution imaginaire de la société. Paris: Seuil.
Chalas, Yves. 1997. « Les figures de la ville émergente ». In La ville émergente, édité par Geneviève Dubois-Taine et Yves Chalas, 237‑70. Collection Monde en cours. La Tour d’Aigues: Editions de l’Aube.
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Urry, John. 2005. Sociologie des mobilités: Une nouvelle frontière pour la sociologie ? Paris: Armand Colin.
1 Depuis 1989, les compétences urbanistiques et de mobilités sont partagées entre la Région de Bruxelles-Capitale et les 19 Communes (municipalités) qui la composent. Auparavant, la Province du Brabant et puis l’Agglomération de Bruxelles formaient des entités intermédiaires entre les communes et l’Etat alors national dont les compétences étaient partagées entre le Ministère des Travaux Publics et son Administration des Routes, d’un côté, et le Ministère des Communications et son Administration des Transports (en commun), de l’autre.
2 Les activités de la journée sont perçues, non plus dans une continuité, mais comme des moments isolés par des périodes de déplacements qui constituent autant de rupture de rythme et d’espace.
3 Sorte d’imaginaire consolidé associé à l’analyse cognitive de Pierre Muller, le concept de référentiel souligne le rôle important des idées, des discours et des récits dans la définition des politiques publiques. Il ne permet que difficilement de prendre en compte les imaginaires émergents qui naissent de troubles sensibles préréflexifs et se « construisent », se « clarifient » ensuite en discours et en revendications à travers les controverses qui marquent l’urbain.
4 Les luttes urbaines qui parcourent Bruxelles à partir des années 1970 rejouent l’opposition entre traditionnalistes et modernes. Les associations d’habitants défendent le bâti existant contre les démolitions, et la qualité de vie en ville contre l’automobilisation. Cet activisme citoyen prend beaucoup à partie le politique et sensibilise l’opinion publique à travers la médiatisation de certaines affaires : la bataille des Marolles et le Quartier Nord, notamment.
5 L’ambiance se définit comme « un espace-temps éprouvé en termes sensible » (Thibaud 2010, 206).
Pour le Forum Vies Mobiles, la mobilité est entendue comme la façon dont les individus franchissent les distances pour déployer dans le temps et dans l’espace les activités qui composent leurs modes de vie. Ces pratiques de déplacements sont enchâssées dans des systèmes socio-techniques produits par des industries, des techniques de transport et de communication et des discours normatifs. Cela implique des impacts sociaux, environnementaux et spatiaux considérables, ainsi que des expériences de déplacements très diverses.
En savoir plus xLe déplacement est un franchissement de l’espace par les personnes, les objets, les capitaux, les idées et autres informations. Soit il est orienté, et se déroule alors entre une origine et une ou plusieurs destinations, soit il s’apparente à une pérégrination sans véritable origine ou destination.
En savoir plus xLe système vélo est l’ensemble des aménagements, des matériels, des services, des règlements, des informations et des formations permettant d’assurer sur un territoire une pratique du vélo efficace, confortable et sûre.
En savoir plus xLa mobilité active a trait à toute forme de déplacement effectué sans apport d’énergie autre qu’humaine (sans moteur) et par le seul effort physique de la personne qui se déplace. Elle se réalise à l’aide de modes eux-mêmes dits « actifs », principalement la marche et le vélo.
En savoir plus xUn mode de vie est une composition - dans le temps et l’espace - des activités et expériences quotidiennes qui donnent sens et forme à la vie d’une personne ou d’un groupe.
En savoir plus xLes recherches sur la transition s'intéressent aux processus de modification radicale et structurelle, engagés sur le long terme, qui aboutissent à une plus grande durabilité de la production et de la consommation. Ces recherches impliquent différentes approches conceptuelles et de nombreux participants issus d'une grande variété de disciplines.
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