Aurélie a 38 ans. Elle est graphiste indépendante. Elle travaille là où elle est, entre son camp de base à Paris, sa maison de famille dans Le Perche et ses amis à Nantes ou Londres. Tout ce dont elle a besoin ? Une bonne connexion internet et des clients compréhensifs.
Aurélie a longtemps travaillé comme graphiste pour des agences de communication. Elle n’adhère plus au cadre de vie auquel elle a toujours été habituée : Paris, vivre en immeuble, avoir un bureau. D’espace de co-working en espace de co-working, elle finit par vivre dans plusieurs lieux, prenant le train pour rejoindre des amis à Nantes ou sa maison de famille en Normandie. Temps professionnel et vacances s’imbriquent sans distinction.
Ce travail mobile n’est possible que par une grande utilisation des moyens de communication. Elle possède un site web et un LinkedIn. Elle communique par Skype et par mail avec ses clients. Elle montre sa créativité sur Twitter, Instagram, TumblR et Pinterest. Elle revient à Paris de temps en temps : un rendez-vous, du matériel à récupérer...
Je suis graphiste indépendante. Je n’ai pas de bureau fixe. J’ai un camp de base, c’est Paris, car en print 1 j’ai besoin de matériel pour travailler. Il faut le stocker. Après, je vis beaucoup dans le Perche où il y a la maison familiale. Ce sera mon prochain camp de base. Je vais en Bretagne où ma grand-mère vit. Ensuite, ce peut être Nantes car j’y ai des amis ou Londres. Je n’ai pas vraiment de résidence, même si je finis par croire que chez les autres, c’est chez moi.
A Nantes, c’est un couple. J’y vais parfois pour le week-end. Ils m’accueillent aussi dans leur chambre d’amis pour de longues périodes avec mon chat (rires). Je passe du temps avec eux, je profite vraiment de la ville, de sa richesse culturelle. J’ai vraiment le sentiment que l’on devient coloc’ au moment où l’on vit ça. Je fais à manger comme si j’étais chez moi. Je fais les lessives.
Je suis parisienne, mais je ne veux pas être à Paris tout le temps. J’ai grandi en immeuble. On ne voyageait pas énormément avec ma famille, simplement en voiture pour les vacances.
J’ai beaucoup travaillé en agence. Puis de plus en plus chez moi. Au bout du moment, c’est sympa chez soi, mais voir le même lieu le matin, le midi, le soir, la nuit, et le lendemain à nouveau, voilà…
Donc, on commence à se dire « où est ce que je peux voir des gens le matin ? ». On atterrit souvent dans des espaces de co-working. On se regroupe et on commence à avoir une ouverture sur d’autres possibles. Il y a un espace de co-working pas loin de chez soi, puis un autre un peu plus loin qui a l’air sympa et il y en a un dans une ville où il y a des copains. « Ah ben tiens, on va y aller ». Puis, on s’aperçoit que l’on a sa valise avec soi et son bureau que l’on trimballe. Mon mode de vie a beaucoup évolué sans que je me rende compte, au départ, que je devenais de plus en plus nomade.
Pour ma part, la décision est souvent dictée par l’envie. Paris j’en ai marre, j’ai envie d’aller voir ailleurs, des amis qui peuvent m’héberger, j’ai un espace de co-working, je prends un endroit quelque part et j’y vais. Dans mon cas, j’ai rarement besoin de bouger pour le travail. Je bosse depuis n’importe où. Cette année, j’ai passé 6 mois dans le Perche, 2 mois à Nantes, un peu plus longtemps à Paris et un peu en Bretagne. Il n’y a pas de routine.
Je me déplace principalement en train. J’aime regarder le paysage et c’est aussi un moment où je travaille. A Paris, je prends le métro, le bus, le tram… L’avion, j’aimerais bien que ce soit un peu plus car j’irais plus loin. Mais je n’aime pas du tout l’avion.
En fait, je fais des grands déplacements entre les villes et une fois sur place, ce sont des déplacements quotidiens. J’habite à Paris, puis j’habite à Nantes, etc…
Tout est mélangé. Je peux travailler quelque part et être en vacances dans le même lieu. C’est vraiment le fait d’arrêter de travailler pour moi qui compte. Je n’ai pas de semaine et de week-end ou de distinction vacances / pas vacances. En plein milieu de la semaine, il y a un petit cinéma à côté de là où je suis, il y a un super film, j’y vais. Par contre, je vais travailler le samedi car je n’ai rien de prévu. Finalement je suis en vacances quand je ne suis plus joignable par mes clients.
Je ne pourrais pas faire ce que je fais s’il n’y avait pas l’hyper-communication. Peu importe où je suis, je continue mes relations professionnelles et sociales. L’ordinateur me permet d’être connectée par skype et les mails. Je n’aime pas trop le téléphone, mais j’utilise les textos, what’s app et hangout.
Elles sont ponctuelles. Ça peut être devoir retourner chez moi pour des questions de matériel. Aussi, beaucoup de gens ont encore du mal à accepter que l’on ne fasse pas une réunion pour se dire les choses. Par exemple, un client voulait faire 4 heures de voiture aller-retour pour parler d’un projet. Il m’a appelée. Pour être tout à fait honnête, j’étais en train de faire mes courses. Au téléphone, je l’ai amené à faire la réunion en une demi-heure.
C’est pouvoir me dire que je ne suis pas figée. J’aime la ville, j’aime la nature et je peux avoir les deux. En ce moment, je suis en train d’aller de plus en plus vers la nature. Le Perche va devenir mon prochain camp de base. Je peux presque assouvir toutes mes envies. J’ai envie d’aller dans une ville, j’y vais. J’ai envie d’être isolé de tout, je suis isolé de tout. Je n’ai pas à choisir en fait. La ville est en train de s’effacer parce que l’on peut, par les moyens de communication, commencer à travailler en dehors.
Je souhaite avoir un deuxième métier en parallèle, fleuriste, et j’essaie de trouver des solutions pour qu’il soit mobile sur des événements, notamment des mariages. C’est une question de planning dans l’année entre les moments où je suis occupée par le graphisme et ceux où j’ai plus de temps libre.
Je m’intéresse au mouvement des « tiny houses », ces petites maisons que l’on peut déplacer. Ce serait une solution pour avoir un bureau et une base pour faire mes bouquets. Je vais vers beaucoup moins de besoins, moins de choses. Les mois que j’ai passés dans le Perche tiennent dans deux petites valises et un sac de travail. Et j’ai très bien vécu !
1 Le « print » en graphisme fait référence à la production des documents statiques imprimés tels que des affiches, des livrets de présentation, des prospectus, des encarts publicitaires, etc… Aurélie a besoin de matériel pour voir le rendu physique de certaines couleurs ou texture d’impression en fonction des encres et de la nature du support.
Un mode de vie est une composition - dans le temps et l’espace - des activités et expériences quotidiennes qui donnent sens et forme à la vie d’une personne ou d’un groupe.
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