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Les mouvements cyclistes peuvent-il participer à la transition écologique ?

Recherches en cours
Début: Août 2021
Fin: Juin 2024

La mise en place de politiques cyclables dans les villes d’Europe, des États-Unis et d’autres pays, y compris parmi les villes des pays du Sud, doit beaucoup au lobbying des mouvements pro-vélo. Alors que la place du vélo dans la transition mobilitaire est encore à définir, cette recherche a pour objectif de réaliser une analyse comparative des mobilisations cyclistes en France et aux États-Unis et de questionner leur rôle dans la transformation sociale, politique et environnementale des espaces dans lesquels elles émergent.

Acteurs de la recherche

 

Contact : Christophe Gay

La récente remise en question de la domination de l’automobilité et des combustibles fossiles permet d’envisager des « futurs post-automobiles » (Dennis et Urry 2009) et des « transitions de mobilité » (Nikolaeva et al. 2019). Pour faire avancer cette transition vers une mobilité durable, défenseurs du cyclisme et décideurs politiques ont opté pour une promotion du « transport actif » (vélo et marche) alliée à un renforcement des transports en commun et de nouvelles formes de micro-mobilité. Cependant, alors que les impacts de l’expansion des pratiques cyclistes et des infrastructures cyclistes qui les accompagnent sont encore mal définis, la dépendance à la voiture est toujours aussi forte et profondément ancrée dans la plupart des territoires. En outre, la mise en place de politiques de transport orientées vers la baisse des émissions de carbone fait courir le risque de rendre les transports plus chers, donc moins accessibles aux revenus les plus faibles.

Objectifs

La mise en place de politiques cyclables dans les villes d’Europe, des États-Unis et d’autres pays, y compris parmi les villes des pays du Sud, doit beaucoup au lobbying des mouvements pro-vélo. Alors que la place du vélo dans la transition mobilitaire est encore à définir, cette recherche a pour objectif de réaliser une analyse comparative des mobilisations cyclistes en France et aux États-Unis et de questionner leur rôle dans la transformation sociale, politique et environnementale des espaces dans lesquels elles émergent.

Cette recherche explorera la façon dont l’activisme politique émerge des mouvements cyclistes, ainsi que le rôle de ces mobilisations dans l’élaboration de transitions sociétales plus larges. Cette question intéresse les théoriciens de la justice en matière de mobilité (Sheller, 2018) et les historiens de la mobilité urbaine (Emanuel et al., 2020), et peut être abordée de multiples façons. La présente recherche se concentrera sur le rôle des activistes qui participent au « Bikespace », défini comme un tiers-lieu mobile centré sur le vélo, dans leur diversité : experts-citoyens, à la fois praticiens, planificateurs et activistes ; leaders et organisateurs communautaires, qui travaillent auprès de différentes communautés pour des agences gouvernementales et des sociétés de planification territoriale ; activistes politiques ; et « activistes-chercheurs », qui jouent un rôle central dans la diffusion des discours, des cadres et des représentations des mouvements cyclistes et participent ainsi activement à l’impact et à l’efficacité de ces mobilisations. Le projet cherchera à mieux comprendre l’influence de ces militants intersectionnels sur les réseaux politiques locaux, ainsi que sur la construction de mouvements plus larges de transition écologique.

Ces dernières années, les mouvements de cyclistes ont été actifs dans la promotion de politiques favorisant le vélo et les objectifs politiques qu’ils défendent en France et en Amérique. Des chercheurs militants ont été impliqués sur le terrain – en dirigeant et en organisant des actions –, mais aussi à l’université, d’où ils ont suivi ces mouvements. Ces expériences de mobilités quotidiennes devenues mobilisations politiques ont été décrites dans la littérature académique en France et aux États-Unis (Lugo, 2018 ; Rigal 2020), également sous l’angle de la marginalisation de certains publics, tels que les femmes (Abord de Chatillon, 2020) ou les minorités raciales (Barajas, 2016 ; Lugo, 2018). Trois problématiques ressortent de ces études :

  • Comment les motivations, les valeurs et les pratiques incarnées du vélo, dont l’élaboration se fait au sein du « Bikespace » des mouvements cyclistes, façonnent-elles leurs objectifs politiques et les actions qu’ils mènent pour les atteindre ?
  • Quel rôle peuvent jouer les mouvements cyclistes en intégrant les initiatives locales à des problématiques de transition durable, puis en les transposant à l’échelle urbaine, nationale et transnationale ?
  • Enfin, comment le font-ils dans des contextes de politique intersectionnelle, qui inclut des groupes généralement exclus de la planification urbaine et de la planification des transports ?

Méthodologie

Cette recherche analysera et comparera la transformation politique opérée par différents mouvements cyclistes issus de contextes locaux et nationaux dans leurs aspirations à accroître leur influence à toutes les échelles. Les terrains de cette proposition doctorale seront choisis en fonction des ancrages territoriaux des réseaux de militantisme et de recherche sur le vélo auxquels appartient son auteur (notamment LHC et The Untokening, et particulièrement à Genève, Paris, Philadelphie, Los Angeles et Bogotá), ainsi que des rassemblements, réunions et congrès où se retrouvent les militants.

L’approche combinera différents types de méthodes, adaptées à différentes échelles :

  • 1) à l’échelle du corps, la recherche étudiera, au moyen de l’observation participante, la façon dont les identités intersectionnelles (liées à l’origine, au genre, à la classe ou au statut migratoire) façonnent les pratiques de vélo, les opinions politiques et les objectifs des participants.
  • 2) à une échelle méso, seront analysés les structures organisationnelles et les événements organisés par les activistes cyclistes afin de mieux comprendre comment ces acteurs font pression et formulent des politiques pour influencer la production de « Bikespaces », agissant ainsi sur les pratiques de gouvernance locale et régionale ;
  • 3) à un niveau macro, la recherche étudiera la façon dont ces acteurs participent à la construction de réseaux nationaux et finalement transnationaux d’activisme cycliste qui informent les politiques adoptées dans leurs pays respectifs.

Bibliographie

Abord de Chatillon M. (2020) “Feminine Vélonomy: Characterising women’s experiences of bicycle repair and maintenance within patriarchal contexts”. In Cycling societies: emerging innovations, inequalities and governance, dir. D. Zuev, K. Psarikidou and C. Popan, Routledge.

Barajas, J. M. (2016). Making Invisible Riders Visible: Motivations for Bicycling and Public Transit Use among Latino Immigrants (Doctoral dissertation, UC Berkeley).

Dennis, K., & Urry, J. (2009). After the car. Polity.

Emanuel, M., Schipper, F., and Oldenziel, R. (2020) A U-Turn to the Future: Sustainable Urban Mobility since 1850. New York and Oxford : Berghahn Books.

Nikolaeva, A., Adey, P., Cresswell, T., Lee, J. Y., Nóvoa, A., & Temenos, C. (2019). Commoning mobility: Towards a new politics of mobility transitions. Transactions of the Institute of British Geographers, 44(2), 346-360.

Rigal, A. (2020). Changer la vie dans un atelier d'autoréparation de vélo. Forum Vies Mobiles.

Sheller, M. (2018). Mobility justice: The politics of movement in an age of extremes. Verso Books.

Sheller, M. (2020). Mobility Justice. In M. Büscher, M. Freudendal-Pedersen, S. Kesselring and N. Grauslund Kristensen. Handbook of Research Methods and Applications for Mobilities. Elgar Publishing.

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