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La téléconsultation territoriale : une solution de e-santé au service des nouvelles proximités ?

Recherches en cours
Début: Octobre 2023
Fin: Avril 2026

La crise de la Covid a fait exploser la pratique de la téléconsultation à domicile, via des plateformes dédiées. Or, une autre offre d’e-santé se déploie en France depuis 2019 : la téléconsultation en cabines, ou téléconsultation « territoriale », comme la nomme le chercheur en géographie Philippe Vidal. Ce dernier souhaite mettre ce dispositif à l'épreuve des faits : la téléconsultation territoriale est-elle une solution d'avenir pour contrer la désertification médicale, argument majeur présenté par les opérateurs privés pour en encourager le déploiement ?

Acteurs de la recherche

 

La Covid-19 a fait émerger un certain nombre de besoins en lien avec le numérique. En effet, le confinement et les difficultés de déplacement ont entraîné un recours de plus en plus important au numérique, dans tous les domaines de l'habiter, en particulier au sujet de l'accès au soin (e-santé). En matière d'e-santé, qui ouvre un très large spectre d'usages et d'activités médicales, une proposition a particulièrement émergé : celle de la téléconsultation. En volume et selon la cour des comptes, nous sommes passés de 140 000 téléconsultations remboursées en 2018 à 18,4 millions en 2020. Ces téléconsultations répondent dans une très large proportion à des usages en situation d'autonomie où le patient s'organise avec ses propres moyens informatiques et sa propre capacité à verbaliser les symptômes dont il souffre. Il appuie éventuellement ce déclaratif par une mesure personnelle de ces propres données de santé (température, tension, etc.) qui responsabilise le patient dans l'élaboration du diagnostic, ce qui peut laisser la place à des erreurs de mesure aux conséquences importantes.

Concomitamment à cette pratique de téléconsultation autonome émerge la téléconsultation « territoriale ». Par téléconsultation territoriale est entendue la pratique qui consiste, pour le patient, à se rendre dans une structure dotée d'une cabine ou d'une borne de téléconsultation pour obtenir un rendez-vous avec un médecin. La logique est que les lieux d'accueil de ces bornes soient proches de l'habitant. Ce sont le plus souvent des lieux non traditionnellement dédiés à l'exercice des soins. Selon la base de données actuelle des chercheurs, qui comporte plus de 3 000 cas et qui reste à compléter jusqu'en 2026, 90 % de ces lieux d'accueil sont des pharmacies, et les 10 % restant sont des résidences seniors, des équipements municipaux, des parapharmacies en supermarché, des cabinets d'infirmiers, des maisons de santé, des universités, des sièges d'entreprises… Cette diversité de lieux ne cesse de s'étoffer depuis 2018 et une nouvelle perspective semble prometteuse dans le domaine de l'optique qui s'équipe de plus en plus de bornes de téléconsultation spécifiques pour procéder à l'examen ophtalmologique. Les bornes ou cabines installées dans ces lieux sont des dispositifs connectés, dotés de tensiomètre, thermomètre, dermatoscope, oxymètre, otoscope, qui permettent de fournir des informations fiables aux professionnels de santé de l'autre côté de l'écran en complément d'un échange visuel et verbal.

La téléconsultation territoriale s’est installée en France a un rythme accéléré depuis 2019 avec la promesse de lutter contre l’apparition des déserts médicaux, de lutter contre la crise des urgences et d’anticiper les besoins de prise en charge accrus liés au vieillissement de la population. À ce jour, environ 3 000 dispositifs sont installés. Selon les estimations des opérateurs privés, il pourrait y en avoir entre 25 000 et 30 000 sur le territoire national d'ici 2030. Cela ne serait pas sans conséquences sur l'organisation du soin en France, notamment de premier recours, c'est-à-dire la médecine de ville, la médecine de proximité. Ces chiffres prennent tout leur relief quand on sait de façon certaine que la France devra assumer un vieillissement de sa population important dans les années à venir, ce qui aura pour conséquence d'augmenter les besoins en matière d'accès au soin.

Cette étude doit permettre de faire une évaluation de la pertinence de la téléconsultation territoriale pour résoudre la problématique des déserts médicaux. Quatre sous-objectifs doivent nourrir cette démarche d'évaluation :

  • Une analyse spatiale permettant de voir si en effet, les dispositifs s'installent au plus près des besoins au regard de l'APL. L'indice d'Accessibilité Potentielle Localisé (APL) évalue la densité médicale par commune au regard des besoins habitants
  • Une enquête volumétrique (nombre de téléconsultations par équipement) auprès de 12 lieux permettra de mesurer, au-delà de la couverture potentielle, si le dispositif permet en effet de pallier l'absence de médecins traitants (une borne = un médecin traitant ?)
  • Une enquête auprès de ces mêmes 12 sites portera sur le rayonnement géographique des bornes et cabines de téléconsultations, et permettra de comprendre l'impact spatial du dispositif et sa zone d'exercice
  • Une enquête auprès des maires fortement engagés dans le déploiement de ces bornes et cabines de téléconsultation (appréhendées ici comme levier de développement local) permettra de comprendre les ressorts, les difficultés, les réussites, les déceptions de ces élus vis-à-vis des équipements de téléconsultation territoriale sur lesquels ils ont misé.

Le projet s'engage sur trois années pour permettre d'analyser sur le temps long les impacts socio-territoriaux des dispositifs. Il s'appuie à la fois sur des méthodes quantitatives (analyses spatiales en lien avec l'APL – accessibilité potentielle localisée) et qualitatives (enquête de terrain).

Déplacement

Le déplacement est un franchissement de l’espace par les personnes, les objets, les capitaux, les idées et autres informations. Soit il est orienté, et se déroule alors entre une origine et une ou plusieurs destinations, soit il s’apparente à une pérégrination sans véritable origine ou destination.

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Confinement

Les mesures de confinement instaurées en 2020 dans le cadre de la crise du Covid-19, variables selon les pays, prennent la forme d’une restriction majeure de la liberté de se déplacer durant un temps donné. Présenté comme une solution à l’expansion de la pandémie, le confinement touche tant les déplacements locaux qu’interrégionaux et internationaux. En transformant la spatio-temporalité des modes de vie, il a d’une part accéléré toute une série de tendances d’évolutions préexistantes, comme la croissance du télétravail et des téléachats ou la croissance de la marche et de l’utilisation du vélo, et d’autre part provoqué une rupture nette dans les mobilités de longue distance. L’expérience ambivalente du confinement ouvre sur une transformation possible des modes de vie pour le futur.

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